Souvent, lors de consultations d’ostéopathie dans une écurie on se rend compte qu’un cavalier monte des chevaux qui ont des dysfonctions qui se ressemblent. La question se pose alors de savoir pourquoi, quelle relations peut-on faire et quelle attitude prendre ?
Est ce le travail et la façon dont il est exécuté ? Ou bien est ce plus profond que cela et d’une manière plus directe c’est le corps du cavalier et ses propres dysfonctions qui imposent des dysfonctions au cheval.
Dans un mémoire sur le centaure qui explore le sujet, il a été montré que théoriquement et grâce à ce qu’on appelle les oscillateurs neuronaux en particulier, les tensions du cavaliers peuvent théoriquement s’inscrire dans le cheval ou l’inverse.
Un article publié dans le 4Pattes résume cet aspect théorique.
– article 1582, Journées Cueillettes
2 Expériences
A) PREMIERE SERIE DE CAS (A) :
Ils répondent à la question :
– Si deux chevaux montés par un même cavalier ont la même dysfonction d’iliaque, qu’en est-il du bassin du cavalier ?
De par notre travail d’ostéopathe sur les animaux, appelés pour consulter un cheval, il est plus facile de prendre le problème dans le sens cheval - cavalier que dans le sens cavalier – cheval.
Il aurait été intéressant de prendre un cavalier montant de manière exclusive deux chevaux et de tester son bassin et ceux des chevaux afin de voir si la corrélation est intéressante. Mais prendre le problème dans l’autre sens, parce que les deux chevaux sont déjà en dysfonction de la même manière, permet de donner une valeur plus particulière au résultat trouvé chez le cavalier et d’avoir un résultat plus significatif sur un petit nombre de cas.
Critères de sélection des cas :
– Dans le cadre de consultations d’ostéopathie équine.
– Si et uniquement si, DEUX chevaux montés exclusivement par le MÊME cavalier
– Présentent une dysfonction quelconque du même iliaque.
– Le cavalier, s’il est d’accord, est alors testé afin de déterminer ses dysfonctions ostéopathiques.
– Ne sont pas inclus les chevaux montés par un même cavalier et ne présentant pas de dysfonctions iliaques ou des dysfonctions d’iliaques différents.
– Sur Six mois de recherche de tels cas, 4 cas seront trouvés sur un total de 730 consultations de chevaux : le plus souvent il n’est montré qu’un cheval à la fois, et régulièrement, les chevaux ont plus d’un cavalier habituel. Mais fréquemment, si ces deux conditions sont respectées on retrouve des dysfonctions homonymes.
Méthode :
– Les commémoratifs sont recueillis, sur les chevaux, souvent de manière imprécise car il est rare que le cavalier connaisse l’historique de son cheval comme il faut car les changements de propriétaire sont fréquents pour des chevaux achetés par des cavaliers faisant des concours un but en soi, condition fréquente pour qu’ils montent deux chevaux en même temps. Le cavalier ignore ce qu’il s’est passé au pré et ne se souvient pas de tout, c’est souvent « l’invention » de la dysfonction qui remet la chute en mémoire. Les commémoratifs seront aussi minimum chez le cavalier, celui-ci n’ayant pas demandé de consultation et le but n’est que de typer la relation bassin du cavalier/ bassin du cheval.
– Les deux chevaux sont testés dans leur globalité et en particulier le bassin dans le cadre théorique décrit au chapitre biomécanique, tests et corrections.
– Le cavalier est testé de la même manière. Parfois il peut être traité s’il le désire, mais ce n’est pas une obligation dans ce cadre, d’autant plus que souvent, il déclarera ne pas éprouver de gêne.
Premières conclusions :
Sur ces 4 cas, même si nous sommes conscients qu’il faudrait examiner beaucoup plus de patients pour que le résultat soit significatif, il apparaît que quand les deux chevaux montés par un même cavalier présentent une dysfonction du même iliaque, en se tournant vers le cavalier sur tous les cas explorés, on constate qu’il présente une dysfonction de l’iliaque opposé. Cette dysfonction est en diagonale par rapport à l’axe médian du centaure ainsi constitué. Ce qui nous rapproche des chaînes de dysfonctions classiques du quadrupède, qui présente souvent des dysfonctions couplées épaule/bassin côté opposé. Il apparaît par contre difficile d’aller plus loin dans la corrélation en comparant le sens des dysfonctions et leur qualité (adaptative ou primaire ; fasciale, musculaire ou articulaire).
C’est pour cela que nous avons repris une série de cas avec des critères d’inclusion moins sévères, afin de voir si nous pouvons aller plus loin dans la corrélation.
B) DEUXIEME SERIE DE CAS (B) :
Ils répondent à la question :
– Si un cheval monté par un seul cavalier présente visuellement un défaut dans la symétrie des mouvements du bassin à la marche, qu’en est-il du bassin du cavalier ?
Critères de sélection des cas :
– Dans le cadre d’une consultation d’ostéopathie équine.
– Si UN cheval monté exclusivement par UN seul cavalier, dans un travail régulier depuis plus de trois mois.
– Présente une dissymétrie du bassin dans sa démarche : ce critère facile a été retenu, un côté de la croupe qui monte plus haut que l’autre témoigne d’un défaut « d’élasticité » de ce dernier et signe régulièrement une dysfonction sacro-iliaque du même côté ou une rotation ipsilatérale d’une des lombaires les plus postérieures.
– Il est inclus dans l’étude si le cavalier est d’accord, d’être testé afin de déterminer ses dysfonctions ostéopathiques.
Sur deux mois de recherches de tels cas, 12 cas seront étudiés sur un total de 250 consultations de chevaux, mais par contre dans ce cas, d’autres chevaux auraient pu être inclus avec des conditions de consultations plus favorables et 5% ne reflète en aucun cas la prévalence des chevaux ayant une dissymétrie du bassin.
Méthode :
– Les commémoratifs recueillis, consistent uniquement à savoir si un traitement ostéopathique récent a déjà été effectué sur le cavalier ou sur sa monture, et la quantité de travail hebdomadaire effectuée.
– Des tests sont mis en place pour typer la dysfonction sacro-ilaque éventuelle, il est à noter que le sens de la dysfonction Sacro-iliaque ou ilio-sacrée, en première approximation ne nous semble pas être d’une grande importance, nous n’en avons pas tenu compte dans cette étude, ce qui semble important est que l’amplitude de l’articulation soit restreinte, ce que révèle très bien le test de sutherland.
– Test visuel, structurel, fonctionnel, fascial pour le quadrupède.
On en tire une conclusion quant à la sacro-iliaque du cheval et du cavalier, rapidement on détermine si d’autres zones corporelles de dysfonctions semblent importantes, elles ne seront pas testées précisément, mais restituent une globalité et peuvent donner un éclairage sur le système de fonctionnement conjoint du couple.
– Normalement seul le cheval est traité dans sa globalité sauf demande express du cavalier. Le résultat du traitement n’apporte rien dans cette étude sauf anecdotiquement.
C) ANALYSE DES RESULTATS :
De la première série de cas, il ressort :
– Si les deux chevaux ont une dysfonction sacro-iliaque du même côté, quelque soit son mode d’occurrence : aphysiologique traumatique, physiologique, ou adaptatif,
on retrouve alors une dysfonction sacro iliaque sur le côté opposé chez le cavalier. Cela permet de supposer que des chaînes de tension adaptatives passent bien du cavalier au cheval ou/et inversement, reste à comprendre le mécanisme qui permet cette transmission.
– On ne peut établir sur ces cas de relation systématique entre l’antériorité ou la postériorité de l’un et de l’autre. Une lésion d’infériorité pouvant apporter une lésion antérieure ou postérieure et inversement.
– On ne peut déterminer d’antériorité sur les dysfonctions d’un ou autre élément du couple, qui impose sa dysfonction à l’autre ?
– On ne peut non plus attribuer une dysfonction traumatique à une dysfonction traumatique, articulaire à une dysfonction articulaire, etc… une dysfonction de nature fasciale peut très bien correspondre à une dysfonction traumatique.
De la deuxième série de cas, il ressort :
– On retrouve 6 dysfonctions "droite" et 6 dysfonctions "gauche" chez le cavalier, systématiquement inversées par rapport au cheval sauf dans le cas N°12 où sur un fond d’adaptation inversé, un trauma important a donné une dysfonction du même côté, il est à noter que dans ce cas, le cheval refuse totalement le travail maintenant.
– On ne retrouve pas non plus de cavalier sans dysfonction de bassin avec un cheval sélectionné pour avoir une telle dysfonction, ce qui est à notre avis très important.
– Dans sept cas sur neuf une dysfonction antérieure du cavalier (la plus fréquente : 9/12) est accompagnée d’une dysfonction supérieure de la sacro iliaque du cheval, ce qui du point de vue biomécanique est dans la logique de l’homologie définie par Barrey, un iliaque antérieur d’un côté donne une postériorisation relative de l’autre côté que devrait suivre le bassin du cheval et prédisposer l’iliaque controlatéral à cette dysfonction plutôt qu’à une dysfonction d’antériorité. Il ne semble pas ici possible de déterminer si la façon dont est arrivée la dysfonction, son caractère articulaire ou fascial, son caractère primaire ou secondaire intervient dans le fait de l’inversion antérieur/supérieur ou postérieur/inférieur.
– Dans neuf cas sur douze, des dysfonctions de même nature se correspondent : trauma/trauma (1), articulaire/articulaire (6), fascial/fascial (2).
– Dans huit cas sur douze, le caractère adaptatif (5) ou non adaptatif (3) est similaire.
Sur les deux séries,
– On perçoit régulièrement des dysfonctions que je dirai homologues dans leur localisation et leur qualité et situées loin du bassin, que ce soit au niveau crânien, au niveau vertébral, au niveau viscéral (au niveau des membres, non rencontré de manière évidente dans cette étude).
– Il est aussi à noter ici une relation que l’on retrouve ici entre de vieilles entorses et fractures du bas des membres du cavalier avec certaines dysfonctions lombaires récidivantes.
– Séquelle d’entorse de cheville avec L4 dans un cas
– Fracture péroné tibia et L5 dans un autre cas.
Ce lien peu évident ici a déjà souvent été rencontré, en particulier chez un cavalier ayant eu une mauvaise fracture spiroïde de tibia et qui au fil des ans m’a fait consulter tous ces chevaux avec des dysfonctions de L4 récidivantes et s’aggravant avec le temps, malgré les traitements ostéopathiques jusqu’à ce qu’il accepte de laisser travailler un ostéopathe sur sa fracture.
D) DISCUSSION DES RESULTATS :
Cette étude est faite pour amorcer un début de discussion sur les relations de dysfonctions entretenues entre un cavalier et sa monture.
Nous avons vu que les dysfonctions de sacro-iliaque :
– sont régulièrement rencontrées à la fois sur le cheval et son cavalier, et quasiment systématiquement dans cette étude. Nous rappellerons ici que nous avons donné de l’importance à cette articulation uniquement parce qu’elle est très importante dans le passage d’ordre du cavalier au cheval.
– toutefois, nous avons rencontré un grand nombre de dysfonctions au niveau de L3 ou L4 chez le cavalier, si elle ne nous semble pas devoir interférer beaucoup dans cette étude restreinte, il nous semble, qu’une étude complémentaire sur son influence serait bienvenue.
– Les dysfonctions sont majoritairement croisées par rapport à l’axe médian, une sacro-iliaque gauche sur le cavalier est normalement accompagnée d’une sacro-iliaque droite chez le cheval.
– Il est plus difficile de prédire les sens (antérieur, postérieur, inférieur, supérieur) respectifs des dysfonctions même si elles sont physiologiques. Pourtant, il se dégage une majorité pour l’inversion : une dysfonction antérieure s’accommode bien d’une dysfonction supérieure.
– Le niveau de tension (articulaire, musculaire, fascial, fonctionnel) est plus difficile encore à prédire même s’il semble se dessiner une préférence pour des tensions de même qualité (articulaire/articulaire, fascial/fascial, etc ...).
L’explication, ou tout du moins une première voie d’abord explicative, nous paraît évidente : elle est biomécanique. Quand le cavalier demande à son cheval de faire un pas en faisant une conversion antérieure de son iliaque :
– S’il avance le membre gauche, il demande une inflexion globale de la colonne, donc une infériorisation de l’iliaque gauche de sa monture, qui est aussi le premier effet obtenu par le membre qui quitte l’appui, c’est l’effet obtenu en retour, le postérieur gauche quitte l’appui et s’avance, le temps suivant, il met en conversion antérieure l’iliaque droit, c’est le postérieur droit qui quitte alors l’appui et ce dans un mouvement sinusoïdal régulier où il suffit d’augmenter l’amplitude pour accélérer, de la diminuer pour ralentir, et d’augmenter le poids à droite donc la pression de l’ischium droit qui entraîne une diminution de l’amplitude à droite en la maintenant à gauche pour que le cheval tourne à droite comme si l’on venait de créer un pivot.
On voit donc qu’en cas de dysfonction iliaque droite antérieure ou postérieure, il y aura mécaniquement une diminution de l’amplitude des mouvements de cet iliaque.
Donc confusion des ordres, poids inchangé mais amplitude diminuée, d’où un problème décisionnel parfois difficile à résoudre pour le cheval qui complique la relation cénesthésique que le cavalier entretien avec son cheval. Les conditions de communication plus difficiles vont « tendre » la relation cheval cavalier et faciliter l’occurrence de ce qui va suivre.
De plus le cavalier va compenser par un mouvement accentué d’autres structures, en particulier de sa sacro-iliaque opposée.
L’effet immédiat obtenu sur le cheval est :
– une amplitude régulièrement moins forte des mouvements de la sacro iliaque homolatérale à la dysfonction, qui n’est pas bloquée mais ralentie,
– une amplitude régulièrement trop forte de la sacro-iliaque controlatérale qui se rapproche à chaque mouvement un peu trop de sa barrière motrice dans les deux sens inférieur et supérieur.
Ce simple fait explique qu’il y aura une prédisposition pour cette articulation à entrer en dysfonction car toujours à « taquiner » la barrière motrice. Et cela dans un sens ou dans l’autre, et quelque soit la raison de cette dysfonction : traumatique, faux mouvement, métamère facilité par un problème viscéral, adaptation dans une chaîne musculaire. Le facteur déclenchant peut survenir n’importe quand et de différentes manières, puisque la prédisposition est un place.
Cette explication rend bien compte des observations :
– avec un facteur biomécanique prédisposant , in extenso un mouvement amplifié autour d’un point de restriction que constitue la dysfonction du cavalier et qui entraîne systématiquement, sauf choc trop important, une dysfonction controlatérale.
– Avec un facteur déclenchant qui lui peut intervenir n’importe quand au cours du travail et explique qu’il n’y ait pas la corrélation exacte que l’on aurait pu attendre entre antériorité et supériorité et postériorité et infériorité. Rappelons que l’iliaque antérieur du cavalier, situé au dessus de D18 favorise une inflexion de la colonne donc une infériorité de l’iliaque droit, et par conséquent un iliaque gauche supérieur (iliaque gauche postérieur du cavalier) et que travaillant préférentiellement dans cette zone de supériorité, nous aurions pu penser que l’iliaque gauche serait alors régulièrement en dysfonction de supériorité ce qui n’est pas tout à fait le cas.
Nous sommes convaincus, et la manière dont nous avons posé les critères de sélection vont dans ce sens, que les dysfonctions suivent régulièrement le sens cavalier/ cheval, tant le cavalier cherche le plus souvent à imposer le mouvement à sa monture dans une absence de réelle communication, tant c’est au cheval d’accomplir des mouvements d’une amplitude qu’il ne réaliserait pas seul au pré.
Mais il reste que l’inverse peut être vrai, et que dans ces conditions en cherchant une explication biomécanique, l’iliaque en dysfonction du cheval, imposerait au premier temps décrit de la marche (abaissement de l’iliaque du cheval et resserrement de l’iliaque controlatéral du cavalier contre son sacrum et L5), un resserrement plus complet de l’iliaque controlatéral du cavalier qui pourrait aboutir à une dysfonction croisée aussi.
Toutefois un deuxième niveau explicatif permet d’aller plus loin et comprendre pourquoi, malgré tout les dysfonctions ont tendance à se ressembler en qualité :
– antérieur avec antérieur en contradiction avec la biomécanique.
– articulaire avec articulaire, viscéral avec viscéral, traumatique avec traumatique (9/12)
– C’est le même système qui nous permet d’expliquer aussi les homologies lésionnelles plus hautes (lombaires, dorsales, viscérales, cervicales, crâniennes).
Il nous faut revenir aux notions d’isopraxie, d’isoesthésie, d’accrochage d’oscillateurs neuronaux, d’oscillations vertébrales qui doivent s’harmoniser.
Il nous faut bien admettre que si dans le fonctionnement habituel de l’équitation, on peut expliquer les différents mouvements par l’homologie gestuelle, il paraît évident que qu’il y aura aussi une homologie de dysfonction, la perte de fluidité (quantité et qualité) du mouvement étant calquée par l’un ou l’autre des éléments du couple. Cette perte acquise de fluidité pourra à terme se traduire par une réelle dysfonction.
L’accrochage inter-espèces d’oscillateurs neuronaux en état de fonctionnement normal se produit dans une relation cheval cavalier équilibrée et détendue, mais il semble à la suite de ces observations qu’un oscillateur en mauvais fonctionnement pour cause de dysfonction ostéopathique, induit bien des dysfonctions secondaires quelques étages plus haut dans le même corps mais aussi sur des neurones homologues (l’évolution a conservé systématiquement les solutions nerveuses phylogénétiquement antérieures) d’un autre corps qui se met en communication globale avec vous et cherche une communication cénesthésique impeccable, donc une perception de votre corps, de vos sensations, de vos émotions avec son propre corps et qui véritablement se met au diapason.
Le passage de la dysfonction doit pouvoir se faire dans les deux sens, mais l’observation laisse à penser que celui qui a le plus de volonté et dirige la relation favorise le passage de ces dysfonctions vers l’autre. Et voilà le fidèle destrier transformé en récipiendaire de nos tensions physique et mentales….
6-CONCLUSION :
Ceci n’est qu’une approche dans la compréhension de ce qui se passe entre deux corps qui se côtoient et travaillent ensembles.
La notion d’accrochage d’oscillateurs neuronaux nous semble une voie à explorer particulièrement importante dans l’explication des synchronicités observables dans nos consultations sur des corps en relation : homme/cheval mais homme/homme aussi et surtout.
Elle permettra sans doute de comprendre comment, les tensions et émotions se répercutent dans l’entourage.
D’ores et déjà en restant dans le cadre de cette étude, même si nous sommes conscients que la formalisation conceptuelle et l’expérimentation de ces notions reste un champ à défricher, trois conséquences se dégagent immédiatement :
– contrairement au Tennisman, le Cavalier a la chance d’être un sportif qui possède un appendice formidable, le cheval, qui est vu comme le prolongement de son corps et qui a suffisamment de souplesse pour s’accorder à lui, et amortir ses soucis corporels, contrairement à la raquette de tennis, ce qui permet à beaucoup de cavaliers de dire qu’ils montent à cheval pour se calmer le mal de dos.
– par là même le cheval peut servir d’empreinte et de révélateur des problèmes de son cavalier et alerter l’ostéopathe alors même que le cavalier est souvent peu conscient de ses tensions et de son mal être. Mais il reste à savoir comment avertir celui qui ne veut pas toujours être soigné, quand son malaise dépend pour beaucoup de choses qui lui semblent lourdes ou qu’il ne maîtrise pas.
– Il semble aussi évident qu’il est peu efficace de soigner un cheval sans soigner son cavalier, mais c’est souvent une bonne solution provisoire en attendant que le cavalier se décide à sauter le pas de l’ostéopathie pour lui-même et souvent en même temps vers une sensibilité plus grande. Et c’est à mon avis seulement dans l’attente de cette évolution que se justifie la persistance de soins ostéopathiques à des chevaux parfois malmenés dans leur corps et dans leur tête par des cavaliers inconscients de l’origine et de la portée du mythe du Centaure.
Toutefois, nous devrions aller plus loin et proposer systématiquement un traitement conjoint du cavalier et du cheval, afin non pas de soigner le cheval et le cavalier mais aussi la relation entre le cheval et le cavalier.
Mise en Pratique :
Au fil des années, observant que cette question du lien cheval/cavalier était cruciale pour bien faire notre travail, j’ai développé une méthode didactique pour le cavalier qui permet de montrer les changements qui se produisent lors d’un traitement conjoint et quasi simultané.
Méthode
Il est proposé au cavalier, d’abord de marcher au pas à côté de son cheval, puis de monter à cru sur son cheval, en général dans un manège ou une carrière. Il devra mettre sa monture au pas et on le guidera dans l’observation de ses ressentis corporels propres et de sa perception de la locomotion de la monture (fluidité, symétrie, etc..). Cette phase dure quelques minutes le temps que le cavalier se sente à l’aise avec les perceptions.
Puis il est proposé un traitement du cheval sans que le cavalier n’en descende. Cela nécessite évidemment des techniques fonctionnelles et fluidiques et non des techniques structurelles. Le traitement du cheval est complet et intègre le fait d’avoir le cavalier sur le dos.
Après ce traitement, le cavalier repart au pas et cherche les différences de perceptions dans son corps et dans la motricité de cheval.
Nouvel arrêt monté, traitement du cavalier sur son cheval, avec la volonté affichée de soigner le cavalier et non la seule personne.
A nouveau monte au pas en essayant à nouveau de dégager les sensations nouvelles dans son propre corps et dans la locomotion du cheval.
Puis à nouveau au pas à côté du cheval tenu en longe.
A chaque étape, il est demandé au cavalier ses impressions et sensations sur son corps, le corps du cheval, ses propres mouvements et ceux du cheval.
Résultats :
Mêmes si les statistiques n’ont pas été faites, de nombreuses consultations ont été réalisées selon ce mode opératoire.
Au préalable il est important de remarquer que le cavalier perçoit en général beaucoup de choses et fait des remarques très pertinentes, ce qui n’était pas a priori évident. Ce qui fait de cette consultation un exercice très didactique dans l’apprentissage des sensations de monte qui marque beaucoup celui qui en est l’agent.
Les phases d’état sont difficiles à verbaliser, car il convient de penser à se faire un référentiel perceptif et proprioceptif que beaucoup de gens n’ont pas travaillé. Par contre le fait en quelques minutes de réaliser trois états notablement différents permet à tout un chacun de se rendre compte visuellement ou de façon cénesthésique des différences. Ceci est vrai pour le cavalier testé, mais aussi pour toute personne présente à regarder.
On demandera donc pour la globalité, et pour chaque partie anatomique du cheval mais aussi de sa propre personne, ce que le cavalier perçoit aussi bien en proprioception qu’en dynamique du mouvement.
Après le traitement du cheval, le résultat est régulièrement un curieux mélange de sensation de libération pour le cheval, avec une meilleure fluidité et un allant retrouvé, et pourtant on note souvent une accentuation de certaines dissymétries qui montrent un déséquilibre, une inadéquation entre les deux corps, comme si l’équilibre avait été rompu.
Dans la deuxième phase après le traitement du cavalier, immédiatement des ressentis corporels de diminution des tensions du cavalier sont généralement décrits, le cheval retrouve outre sa facilité de mouvement, une adéquation avec les mouvements du cavalier, il n’est pas rare pour le cavalier de se sentir "s’enfoncer" dans le cheval et l’impression de suivre naturellement les différents mouvements du dos du cheval.
La dernière marche à côté du cheval permet de fixer les changements sur le cheval non monté et sur le cavalier dans sa marche bipède.
Outre les deux traitements, un espace de discussion sur des ressentis cinétiques et proprioceptifs est ouvert qui permet facilement de placer des connaissances biomécaniques et physiologiques, fort bien reçues dans ce moment de mi-soin, mi équitation.
Conclusion.
Le travail du mémoire théorique avait permis de fixer un cadre physiologique à l’existence d’une relation type centaure entre le cheval et son cavalier et sa partie expérimentale avait permis de confirmer l’existence possible d’une chaîne dysfonctionnelle croisée entre les deux bassins.
La partie clinique permet de se rendre compte que cette relation est bien réelle et au delà des deux seuls bassins anatomiques. Qui plus est avec cette méthodologie outre le soin de la relation entre le cheval et son cavalier on constate un effet didactique pour le cavalier qui lui permet de prendre conscience de cette relation et de la finesse des sensations à acquérir pour mieux travailler.
On se rend alors réellement compte, de l’effet d’une manipulation ostéopathique, de l’influence du cavalier sur le cheval par un examen visuel simple à mettre en œuvre.
L’expérience prouve que même les gens non entraînés à ce genre d’exercice arrivent à verbaliser ce qui se passe.
Après 15 ans de pratique de cette exercice, je ne peux que le conseiller sous cette forme ou une autre, pour les raisons suivantes :
– Pour un cheval monté par une même personne, les dysfonctions du cheval sont effectivement régulièrement cavalier-dépendant.
– Le soin du cheval sans celui du cavalier prédispose à la récidive.
– Le soin du cavalier sans celui du cheval prédispose à une période d’inadéquation de la monture à son cavalier, cette période peut être temporaire ou parfois débouché sur ...un changement de monture !!!
– L’exercice est très didactique dans la démonstration du fonctionnement biomécanique et de la perception cénesthésique, ainsi le cavalier par la suite fait plus attention à la mobilité de son cheval.
Voici un exemple à lire visuellement :